Les Archanges dans le cours de l’année

 
 texte de Manfred Krüger (traduction de Daniel Kmiecik)


Selon l’enseignement des Hiérarchies de Saint Paul et la conception de l’évolution spirituelle de Rudolf Steiner, les Archanges se situent immédiatement en dessous des Esprits du temps ou Archées (“ Primautés ” dans le sens de “ tout premier commençant ”), qui au moment de la première étape d’incarnation planétaire, l’Ancien-Saturne, ont accompli leur degré d’évolution correspondant à celui de l’humanité actuelle. Les Archanges sont les messagers des Primautés, c’est ce que signale leur nom: “ Anges d’Archées ”.

Les Archanges ont accompli leur “ degré d’évolution humanité ” à l’époque de l’Ancien-Soleil, la seconde étape d’incarnation planétaire générale. Ils y acquirent alors leur “ Je ”, par un don des Esprits de la sagesse (Kyriotetes) qui accomplissaient alors leur étape d’évolution d’Esprit de la forme.
La sagesse est aussi à l’origine des Archanges et “ la sagesse rayonne dans la lumière ”. Les Archanges sont rayonnants de lumière. On les nomme aussi “ Esprits du feu ”. L’Ancien-Soleil était une planète de lumière, comme l’Ancien-Saturne était une planète de chaleur.


De nos jours encore, la Terre reçoit sa lumière du Soleil. Les Archanges sont au service du Soleil. La position du Soleil détermine les saisons. Les Archanges sont les régents des saisons : printemps, été, automne, hiver, structurent le cours du temps rehaussé par les fêtes cardinales correspondantes : 

Pâques, Saint Jean, Saint Michel et Noël. Ces quatre saisons se tiennent sous la régence respective des Archanges Raphaël, Uriel (ou Oriphiel), Michaël (ou Michel) et Gabriel.


Leurs noms proviennent de la Tradition juive. Une ancienne prière juive dit en effet:

Vois, gardien d’Israël
Ne t’endors point ni ne t’assoupis;
À ma droite Michaël,
À ma gauche Gabriel,
Devant moi Uriel,
Derrière moi Raphaël,
Et au-dessus de moi
La présence de Dieu.
Gabriel, Raphaël, Uriel et Michaël font partie, avec Anaël, Zachariel et Samaël des sept Archanges “ qui se tiennent devant le Seigneur ”.


Dans la conférence donnée par Rudolf Steiner, le 13 octobre 1923, sur les relations réciproques des quatre Archanges et des quatre saisons, le conférencier évoque d’abord le “ signe du Macrocosme ” tel qu’il est médité dans le Faust de Goethe:

Comme tout s’agite et se meut,
Pénètre tout, s’efforce, veut!
Mouvement des forces célestes,
Glissant puis reprenant l’essor
En se transmettant les seaux d’or,
Votre aile, avec de tendres gestes,
S’élance du ciel à travers
La Terre, emplissant d’ambroisie
Et d’universelle harmonie
De proche en proche l’univers! ”
(Traduction de Jean Malaplate: “ Goethe: Faust I & II ”, Ed. Flammarion)


Ou bien dans la version de Gérard de Nerval: “ Comme tout se meut dans l’univers! Comme tout, l’un dans l’autre, agit et vit de la même existence! Comme les puissances célestes montent et descendent en se passant de mains en mains les seaux d’or! Du ciel à la Terre, elles répandent une rosée qui rafraîchit le sol aride, et l’agitation de leurs ailes remplit les espaces sonores d’une ineffable harmonie ”.
Aux environs de 1770, Goethe a pris connaissance de l’Opus magico cabbalisticum ” de Georg von Welling. Ce livre renferme divers symboles de la Tradition occulte relatifs au Macrocosme. On admet qu’il connaissait aussi le “ Fama Fraternitatis R.C. ” dans lequel il est dit: “ Que vaut l’or, pour celui à qui la nature dévoile ses secrets, qui ne se réjouit pas de pouvoir faire de l’or — ou bien comme dit le Christ — de mettre le diable à son service, mais découvre plutôt les secrets du Ciel, et les Anges de Dieu qui s’élèvent et descendent, et se réjouit d’avoir son nom inscrit dans le livre de la vie ”.
Ce “ signe du Macrocosme ” reste un pâle symbole pour Goethe, par contre, il donna une forme concrète à l’Esprit de la Terre. L’Esprit de la Terre est une véritable imagination de Goethe.


Rudolf Steiner ne se contente pas d’une référence à Goethe ; il saisit l’opportunité de cette imagination et la développe par la pensée. Le “ signe du Macrocosme ” devient pour lui une imagination concrète, aussi soigneusement construite que l’Esprit de la Terre.

L’Esprit de la Terre devient évident dans la changement des saisons : d’abord une image unique. Rudolf Steiner contemple la Terre dans son processus sal, sulfur et mercure, dans le processus de formation de la cendre, dans la polarité or-argent, dans la nature calcaire et l’activité du fer — et cela constamment en rapport avec chacune des entités archangéliques. Puis, en regard du “ signe du Macrocosme ”, tel qu’il fut artistiquement élaboré par Goethe, il donne la vue d’ensemble par cette immense imagination inspirée de l’activité des Archanges dans le cours de l’année.
Par cette activité imaginative-inspirative, l’esprit qui est en l’homme trouve un chemin vers l’esprit qui est dans l’univers. C’est alors que se manifeste la vérité suivante: ce qui est extérieur est intérieur. Comme la Tradition occulte l’a toujours révélé. 

Mais Rudolf Steiner montre que l’extérieur au sein de l’intérieur est quelque chose de tout différent. Un processus de combustion extérieure naturel doit être différencié d’un processus de combustion à l’intérieur de l’être humain. L’extérieur se comporte vis-à-vis de l’intérieur comme la mort vis-à-vis de ce qu’est la vie. Le rapport est déterminé par l’Archange qui mène les événements de la saison, de manière telle que cette vérité vaut pour les mondes supérieurs : Extérieur comme Intérieur — Au-dessus comme en dessous.
L’homme microcosme est un être vivant pénétré d’âme et d’esprit. Sa nature s’enchevêtre dans le cours de l’année par les Êtres vivants pénétrés d’âme et d’esprit que sont Gabriel, Raphaël, Uriel et Michaël, membres du Macrocosme.

 


 


Gabriel

 
C’est l’Archange du temps de Noël. Un Annonciateur : il annonce à la Vierge Marie la naissance de l’Enfant Jésus. Après la naissance, il veillera à son alimentation. Selon un recueil de versets religieux du Moyen Âge, on le désigne comme “ l’Archange qui fait pousser les épis de Dieu ”. La fête de Noël représente la fête de l’espoir, en même temps que la fête du souvenir de la “ chute ” de l’homme. Elle commence le 24 décembre, avec la fête d’Adam et Ève au Paradis. Gabriel chasse Adam et Ève du Paradis, en conséquence de la chute. Dans les jeux du Paradis de Oberufer, il leur crie: “ je vous rappellerai à travers la nuit des temps! ”. Pour cela, l’envoi du Fils était nécessaire. Sa naissance survint à Noël. Gabriel apporte le Message: “ Ave Maria gratia plena, Dominus tecum ” [Salut à toi, Marie, le Seigneur est avec toi!].
Auréolé des forces de la grâce, il apporte aussi le message aux bergers dans les champs et il veille sur les Rois. Il protège la fuite en Égypte et maîtrise de cette manière la totalité des événements de la naissance. Il est vraiment, à proprement parler, l’Archange de la naissance physique.

Rudolf Steiner décrit la Terre, la manière dont au printemps, elle inspire et en hiver, expire. Vue du Cosmos, elle apparaît telle un goutte de vif-argent (mercure). Il parle des processus sulfur, mercure et sal en liaison avec le langage alchymique. En hiver, le processus sulfur se retire complètement, remplacé par la formation de cendre et sous le croûte de sel de la Terre, les forces de la Lune s’imposent et se chargent de caractère terrestre par l’entremise de la cendre.
Au temps de Noël, la Lune s’unit à la Terre et la Terre devient Lune. Marie, la Mère devient aussi Vierge lunaire. Rudolf Steiner insiste: elle devient Lune, “ afin qu’elle soit à même d’accepter en Elle l’activité du Soleil ”. Le Fils est Soleil. De même que l’activité de la Lune prendra un caractère terrestre, au travers de la formation de cendre, ainsi le Fils solaire acceptera la nature terrestre et l’incorporera au travers du lait maternel. L’homme, la Terre et le Cosmos sont considérés là par Rudolf Steiner dans leurs relations mutuelles.
L’accès historique de l’humanité à la fête de Noël prend corps dans cette Image des images : l’Imagination de la Mère et de l’Enfant, telle que la donna Raphaël de manière archétype dans la Madone des Sixtines. À hauteur du visage, se manifeste l’activité des étoiles ; à hauteur de sa poitrine, elle porte le Soleil ; dans les plis de sa robe, se marque la pesanteur terrestre d’une Terre devenue lunaire.
Le grand peintre du monde qui permit cette imagination de Noël, c’est Gabriel, l’Archange de la Lune. Tel un veilleur, il se campe sur le porche de la naissance. Son nom le désigne comme “ Héraut de Dieu ”.

Raphaël

 
Lorsque s’éloigne l’hiver, Raphaël apparaît. Son nom veut dire: “ Dieu guérit ”. C’est l’Archange de Pâques, par essence lié au Mystère du Golgotha, qui se renouvelle chaque année sous sa régence.
Rudolf Steiner construit l’imagination pascale en prenant d’abord en considération l’événement terrestre. Il évoqua à Dornach le sol calcaire [formé de craie du secondaire ou “ jurassique ” qui vient de Jura; il faut signaler que ce calcaire est en partie d’origine animale, ndt], et fit observer que le calcaire, au printemps, manifeste des propriétés différentes de celles de l’hiver. Il devient “ gourd ”, s’anime de convoitise et par là attire la nature du dragon. Au printemps, l’homme subit particulièrement les assauts d’Ahriman. Cela renforce également d’un autre côté l’espoir et la force de l’être luciférien. Rudolf Steiner décrivit la polarité Lucifer-Ahriman dans la nature printanière jusque dans les détails: “ Lorsque les plantes commencent à germer au printemps, alors l’acide carbonique [gaz carbonique dissous dans l’eau, ndt] est attiré par les entités lucifériennes. Et tandis que les êtres ahrimaniens s’efforcent de répandre une sorte de “ pluie astrale ”, afin d’astraliser l’activité vivante du calcaire, les entités lucifériennes, quant à elles, s’efforcent d’attirer l’acide carbonique vers le haut, en tentant de le vaporiser depuis la terre vers les hauteurs ”.
L’homme aussi peut vivre au printemps de manière particulièrement intense cette polarité Lucifer-Ahrimane et rechercher l’équilibre entre le chaud et le froid, la dissipation et le durcissement, la tête et les membres, le passé et le futur. Sur le Golgotha fut créé un centre. L’Imagination du monde est donc au printemps l’imagination de Pâques, que Rudolf Steiner représente dans le groupe en bois sculpté: Christ se dressant au centre, en tant que Représentant de l’humanité, entre une forme d’homme-larynx aux oreilles ailées et une forme d’homme-membres sclérosé. Du centre émane une force de guérison [d’où l’analogie entre “ santé ” et “ salut ”, ndt] : sur le Golgotha, Christ devint Sauveur. C’est pourquoi Raphaël édifie le fondement de cet événement. Raphaël avec le bâton de Mercure. Raphaël, comme son nom l’indique est l’Archange de l’Art de guérir.
La relation de Raphaël à l’homme est d’enseigner. Le contenu de son enseignement est la thérapie du monde qui émane du Christ comme Sauveur. La forme d’expression est dramatique. C’est pour cette raison que Rudolf Steiner composa pour la configuration de la fête de Pâque un Drame-Mystère: “ Dans la mesure où les forces lucifériennes et ahrimaniennes rendent l’homme malade, et dans la mesure où celui-ci peut se laisser guider par la puissance de Raphaël, qui lui enseigne le principe guérisseur, la grande thérapie du monde, alors l’homme peut la contempler et la reconnaître dans le principe du Christ ”. Dans le Drame-Mystère, l’action devient culte, dans lequel il n’y a pas de place pour un “ spectateur ”, car l’homme est inclus dans ce drame, il en est pour ainsi dire le personnage principal. Il devient lui-même, avec l’aide de Raphaël, un guérisseur.

Uriel

 
Uriel règne au plus fort de l’été, tandis que la conscience humaine s’engourdit et s’unit à la conscience de la nature.
Rudolf Steiner décrit le processus à l’œuvre dans la nature en été comme la transformation de l’argent en or. Des fils d’argent organisent un décor sur fond bleu profond. Dans ces formes cristallines étincelantes de reflets argentés, il voit, en regardant vers le bas, l’expression de la volonté cosmique. En élevant le regard, il contemple là-haut une lumière d’or manifestant l’intelligence cosmique. Et “ l’argent de la Terre, cosmique-alchymique se transforme, là-haut, en or cosmique s’animant de vie et de mouvement: c’est un jaillissement continuel de reflets argentés vers le haut où les éclats d’argent se métamorphosent en lumière d’or ”.
Sur ce fond d’or, transparaît l’Archange Uriel dans son royaume. Il manifeste l’intelligence. Son nom peut se traduire par “ Lumière de Dieu ” [d’où parfois la variante “ Oriphiel ”, dans lequel “ l’on perçoit la trace de l’or et de la lumière ”, ndt]. Il incarne la compréhension du monde, expression de l’activité des planètes parcourant l’anneau zodiacal. Ses œuvres sont des activité lumineuses, les “ pensées universelles ”.
Le geste d ’Uriel est décrit comme “ exhortant ” (“ mettant en demeure ”). Uriel contemple d’un regard sévère les manquements et les vertus humaines et suscite l’avènement de ce que Rudolf Steiner désigne comme la “ conscience historique ”. La sagesse d’Uriel conduit à la justice au travers du temps.
Pour ainsi dire littéralement inspirée par la sagesse d’Uriel, surgit la première affirmation de la philosophie occidentale, la phrase d’Anaximandre: “ Ce dont provient pour toutes choses leur naissance, leur mort aussi survenant les y ramène, par nécessité. Car elles se rendent mutuellement justice et se paient compensation pour les dommages dans l’ordre du Temps. ”
Et comme une expression de la pensée d’Anaximandre, résonnent les paroles mantriques de Rudolf Steiner, l’Imagination inspirée par la Saint Jean:

— les hauteurs:
Contemple notre trame
Agitation lumineuse,
Couvant la vie.
— les profondeurs:
Vis en pourvoyant au terrestre
Et structure en respirant
Comme essence régnante.
— le milieu, l’être humain:
Ressens ton squelette
Et son éclat céleste
Dans l’un universel régnant.
— le tout:
Les substances sont condensées
Les manquements sont jugés
Les cœurs sont scrutés.

Dans l’imagination de Rudolf Steiner, nature et moralité sont intimement liées et unies dans le grand concert de la Saint Jean. La musique y tient une place prépondérante car Uriel est, depuis la nuit des temps, l’Archange qui “ conduit les chanteurs qui chantent ses louanges jour et nuit ”.
Mais, comme imagination caractéristique de la Saint Jean, Rudolf Steiner décrit la Trinité: le Fils entre l’Esprit-Père et la Substance-Mère, et à l’arrière plan, l’Archange Uriel “ créant et exhortant ”, son regard sévère dirigé sur la colombe. Lorsque les hommes réaliseront la force spirituelle de la colombe, la Substance-Mère se transformera en Vierge-Sophia.
Cette Trinité comme Imagination de la Saint-Jean: le Fils entre Père-Esprit et Mère-Substance, et en arrière, Uriel fixant la colombe du regard, représente le reflet cosmique de la trinité humaine terrestre de Marie et de Joseph avec l’Enfant-Jésus, sous le geste de bénédiction de Gabriel.

Michel

 
Sur le porche de la naissance, se tient Gabriel, l’Archange de la Lune. Sur le porche de la mort se tient Michel, l’Archange du Soleil.
Le processus de la formation de la graine, en automne, mène à la formation de cendre. La nature montre alors des processus de mort, lorsque Michel domine le cours de l’année. À ce moment et en regard des processus de dépérissement qui se répandent dans la nature, l’homme est appelé à développer un état supérieur de conscience de soi.
Durant tout l’été, le dragon s’est sournoisement activé. Dans le déploiement des beautés de la nature, l’homme s’est laissé complètement charmer à son sujet. Sa conscience estivale s’oriente vers le Cosmos dominé par le processus sulfur. Les processus de mort de l’automne sont l’inévitable conséquence de l’activité estivale du dragon, qui en ce moment d’automne, engendre la crainte.
C’est alors que l’homme peut tourner son regard vers Michel qui vainc le dragon. Cette imagination d’automne possède une origine très ancienne. Les Grecs évoquaient Apollon, qui tua le dragon Python à Delphes. Rudolf Steiner montre combien la chute des météorites de la fin de l’été est en rapport avec l’image des Mystères de ces événements de cette époque de l’année. Le processus sulfur est combattu par les météorites cosmiques. Ce processus se reflète aussi au niveau microcosmique, dans la formation du Fer dans le sang [voir le dernier chapitre du texte d’Ita Wegman, dans ce document, ndt]. Dans les deux cas, s’y active l’épée de Michel. Le 15 octobre 1923, à Stuttgart, Rudolf Steiner parle d’une “ épée de sagesse ”, par laquelle Michel enseigne “ la nature humaine la plus élevée ”.
D’un côté, l’épée est forgée à partir du Fer des météorites, d’un autre côté, Rudolf Steiner évoque “ l’épée de feu ” et ensuite, dans la vue d’ensemble de l’imagination de la Saint Michel: l’épée du Fer flamboyant de Michel.
Dans la culture humaine extérieure, outre diverses commodités, le fer a toujours répandu la mort et la corruption. Le fer suscite la crainte. “ L’épée de Fer ” de Michel, de ce Fer “ tout puissant ”, désensorcelle la puissance en ôtant la peur qu’il inspire. Rudolf Steiner a formulé à ce propos ces quelques vers révélant d’une manière énigmatique le pouvoir du Fer:

Ô homme!
Tu le façonnes à ton service,
Et manifestes son mérite matériel
Dans nombre de tes œuvres.
Mais il ne te sera salutaire
Que lorsque se révélera à toi
La haute-puissance de l’Esprit qui l’anime


Rudolf Steiner caractérise la Saint Michel comme la “ fête de la forte volonté ” et cela concerne l’homme ; car le geste de Michel n’est pas “ exigeant ” à proprement parler, mais “ enseignant ” [indiquant et montrant le chemin, ndt]. Il nous montre une sorte de “ table d’orientation ”, faite de paroles, de pensées, qui sont à méditer. Tout cela afin de ne pas agir directement sur le vouloir de l’homme, mais surtout sur son penser autonome. Il voudrait enflammer le Je en l’homme, tout d’abord dans le penser, à partir de l’activité duquel le sentir et le vouloir peuvent être appréhendés. Ainsi, son nom se comprend, tel un appel interrogatif permanent à l’égard de l’homme: “ Qui est comme Dieu ”. Ce questionnement qu’exprime son essence est pour lui la mesure d’après laquelle il pèse et juge les âmes [fonction psychopompe de l’Archange, ndt].
Ainsi se révèle “ l’autre ” imagination, l’imagination apocalyptique de Michel: l’Archange avec la Balance.
Dieu créa l’homme à son image; le corrupteur déséquilibra l’homme, en lui ôtant le centre. S’il veut recouvrer son équilibre, l’homme pourra peser sur l’autre plateau de la balance. Michel incarne la légitimité du Juge des Mondes: le Christ.
Qui surmonte l’épreuve de la pesée sera conduit par Michel dans la lumière divine. Cela ne vaut pas seulement pour le Jugement Dernier, mais dès à présent dans la vie de l’intelligence sur la Terre. À l’époque christique, Michel prend la place de l’ hiérophante. Celui-ci conduisait les âmes immatures des temps antiques. Michel conduit en indiquant. Il représente un idéal pour les hommes, dans la mesure où ceux-ci cheminent vers la liberté par un penser et un agir autonome.


Actions sur les divers corps composants le Microcosme.

 
Gabriel prend soin de la naissance physique, au début de l’hiver, dans le moment le plus sombre de l’année, lorsque la Terre se retire en elle-même et devient de plus en plus physique, matérielle.
Raphaël veille au renouveau de la nature matérielle. Les forces de vie constituent la base de l’Art de guérir. Raphaël gouverne le corps éthérique.
Uriel, au plus haut de l’été, permet que les manquements soient transformés en vertus. En tant qu’Esprit de l’été, il agit sur le corps astral.
Michel vainc le dragon, afin qu’en automne l’homme renaisse à lui-même, pour un agir librement déterminé par la force de son Je.

Lieux d’action - Regards - Attitudes.

 
Tandis que les Archanges dans leur ensemble, du point de vue de leur Hiérarchie, habitent la sphère matérialisée par l’orbite de Mercure, les sept guides du temps, dont les quatre Archanges des quatre saisons, possèdent chacun en propre, un lieu d’origine de leur action cosmique: Michel agit depuis la région solaire ; Gabriel depuis la sphère lunaire. Les “ grands luminaires ” ont une signification incomparablement plus importantes que les autres planètes. Dans la Bible, seuls Gabriel et Michel sont nommément cités. Ils se tiennent au plus près de l’homme. Le cours des événements de l’incarnation et de la lutte contre le mal nécessitent les énergies les plus fortes : Gabriel et Michel deviennent les puissances les plus élevées parmi les quatre Archanges.
Le lieu cosmique d’activité d’Uriel est la sphère de Saturne, que Rudolf Steiner a caractérisée par la formulation : “ ferveur spirituelle de la sagesse du monde ”. À l’encontre du Soleil, la sphère de Saturne, la planète aux confins, englobe à sa manière la totalité des anciennes sphères planètes [à savoir que nous sommes encore à la fois simultanément vivants dans l’incarnation de l’Ancien Saturne, celle de l’Ancien Soleil et dans l’incarnation de l’Ancienne Lune, quoique nous en soyons bien au quatrième stade planétaire, physique celui-là, sous la direction de Mars et Mercure, ndt]; c’est aussi la porte du monde des étoiles fixes. Rudolf Steiner a dit de l’intelligence cosmique représentée par Uriel, qu’elle est “ fondamentalement composée de l’entremêlement des forces des planètes de notre système solaire, soutenues par l’action des étoiles fixes principalement localisées sur la bande zodiacale ”.
Seul Raphaël exerce ses forces sur l’homme depuis la sphère de Mercure, qui correspond au lieu de la Hiérarchie des Archanges. De toutes les planètes, c’est la plus proche du Soleil et il ne s’en éloigne jamais durant toute l’année.
Les Archanges régents des saisons ont une expression personnelle du regard propre à chacun d’eux. Dans l’imagination, Rudolf Steiner décrit Uriel avec son regard de juge, Michel a un regard qui indique, le regard de Raphaël exprime une gravité mélancolique, Gabriel regarde avec amour. En effet, il lui a fallu une force d’amour particulièrement intense pour bannir l’humanité du Paradis ; et une telle expulsion se renouvelle à chaque processus de naissance. Une telle force d’amour s’épanche dans le regard de Gabriel.
Raphaël est tout particulièrement lié au sens, au but du développement de l’humanité. Au travers de son être; le Logos agit directement en Sauveur. Cette force de transformation du Logos solaire dans les profondeurs de la Terre, Raphaël l’exprime dans son regard. C’est pourquoi Rudolf Steiner exprime le caractère de ce regard comme (profondément, intensément) gravement mélancolique.
Uriel exerce ses forces depuis le lieu le plus éloigné pour l’humanité. Il maintient cette distance au profit de ses jugements, qu’il incorpore dans la mémoire du monde, manquements et vertus y sont inscrits. Certes, tous les Archanges ont une attitude du regard sévère, mais Uriel exprime la sévérité la plus stricte: de son regard de Juge émane la “ conscience de l’histoire ”.
Le regard de Michel est le plus intense, c’est un véritable “ geste ” du regard exhortant l’être humain. Il agit par son regard même. Rudolf Steiner précise que son regard est “ comme un index qui montre ”.

Gabriel sert les Chérubins qui gardent le Paradis. Il mène l’expulsion à bonne fin. Il chasse les hommes du Ciel sur la Terre. Michel, lui, expulse le dragon sur la Terre. C’est pourquoi tous deux brandissent un glaive de feu. En plus de cela, Gabriel porte le lys ou la poutre de la Croix, comme Archange Annonciateur ; Michel porte la balance, signe de justice, au nom et de la part du Christ, le Juge du monde. Raphaël, en tant qu’Archange de la guérison, porte le bâton de Mercure (caducée). Seul Uriel ne dispose d’aucun attribut objectif. Comme musicien du monde, il peut renoncer à la baguette du chef d’orchestre. Il dirige par son regard. A l’égard de manquements humains, Uriel fait un geste de mise en garde.
Gabriel bénit la descente de l’âme dans la matière; Michel montre l’ascension de l’âme hors de la matière; Raphaël crée l’équilibre à l’image de son caducée qui tient le centre.
Qu’ils agissent depuis le ciel, ou depuis l’autre hémisphère, à travers la Terre, leurs regards, gestes et attributs demeurent identiques. Lorsqu’ils se tiennent dans leur souveraineté saisonnière, ils influencent la totalité des événements naturels, moraux et spirituels. Lorsqu’ils agissent depuis l’autre hémisphère de la Terre, ils ne peuvent que faiblement influencer la nature; mais ils atteignent bien la nature subtile de l’homme. La nature terrestre relève toujours de l’influence du gouvernement de l’Archange de chaque saison. L’homme étant devenu largement indépendant de la nature, il se trouve constamment sous l’influence des quatre Archanges: l’influence de chacun d’eux prenant une coloration dépendante du lieu d’origine de leurs actions.



Actions concertées des Archanges.

 
La Terre tourne autour du Soleil. Les Archanges l’accompagnent dans sa révolution. Chacun dispose d’une saison déterminée pour développer sa tâche. La saison offre aussi l’apogée de l’influence de l’Archange correspondant, puis il se retire ensuite pour céder la place à l’Archange suivant. Goethe exprima cette image avec son âme de poète:

“ Glissant, puis reprenant l’essor,
En, se passant les seaux d’or. ”
Puis il a vu comment leur action s’étend de proche en proche jusqu’à la Terre et comment leurs forces spirituelles
“ Votre aile, avec de tendres gestes,
S’élance du ciel à travers
La Terre, emplissant d’ambroisie
Et d’universelle harmonie
De proche en proche l’univers! ”


Rudolf Steiner décrit aussi cela, avec plus de précisions.
Tandis qu’en été Uriel s’active depuis le Ciel, Gabriel envoie ses forces depuis l’autre hémisphère, là où règne l’hiver, au travers du globe. Son influence se modifie, non pas sa tonalité, mais plutôt dans le domaine d’existence concerné. En été Gabriel agit dans la nourriture: il fait “ pousser les épis de Dieu ”. C’est pour cette raison que Dionysius, moine-peintre du Mont Athos, représenta Gabriel tendant le pain céleste à Marie dans le temple, tout en le bénissant. La nourriture a bien pour base des substances physiques, mais les forces de la nourriture que génère Gabriel son essentiellement actives dans le domaine éthérique. 

Gabriel agit aussi, pendant l’hiver, jusqu’au niveau physique; en été, tandis que le globe terrestre s’interpose entre les hommes et lui, son action n’atteint plus que le niveau éthérique. Alors sa force d’incarnation devient force de nourriture. La nature produit et met à disposition la nourriture pendant l’été. Gabriel à ce moment, dispense la force intérieure d’élaboration des aliments.
Décroissantes depuis le printemps, les forces de vie de Raphaël n’atteignent leur niveau le plus élevé qu’en automne, tandis que règne Michel; Raphaël envoie ses forces de guérison au travers de la Terre. Le lieu privilégié de l’impact des forces de guérison est, bien entendu, le corps éthérique sur lequel agit directement Raphaël, au printemps. En automne, il n’agit plus sur le corps éthérique, mais sur le corps astral qui trouve principalement son expression dans le rythme respiratoire. Rudolf Steiner insiste: “ Toutes les forces de guérison sont originellement présentes surtout dans le système respiratoire humain. Et qui comprend l’ensemble de la sphère respiratoire humaine, prend connaissance de ces forces de guérison qui émanent de l’homme. Les forces de la santé ne résident pas dans les autres systèmes organiques qui nécessitent eux-mêmes d’être guéris ”.


L’homme a un besoin tout particulier de ces forces intérieures de guérison que Raphaël lui envoie en automne, alors que la nature dépérit autour de lui. Elles contribuent au maintien de l’équilibre au sein de l’entité humaine, entre l’extérieur et l’intérieur, nécessaire fondement d’un agir libre, ce qu’encourage Michel au même moment. [On ne peut donc parler que de collaboration harmonieuse des Archanges. ndt]
En hiver règne Gabriel. La Terre cristallise. Les forces physiques manifestent leur prépondérance. C’est alors qu’Uriel, depuis l’autre hémisphère, agit sur le pôle tête, considéré comme l’organisme des pensées. L’été, il a agi dans la nature estivale depuis le Cosmos, sur le corps astral de l’être humain, l’inspirant de manière à ce qu’il [l’homme, ndt] métamorphose ses fautes et manquements en vertus. En hiver le voilà qui agit à l’intérieur de l’organisation des forces du penser, au sein duquel peut s’épanouir le Je de l’homme. Le Je vit dans le penser. Celui-ci nécessite une opposition, une résistance qu’il rencontre justement dans la cristallisation hivernale. [C’est ce qu’a voulu expliquer Rudolf Steiner en disant, un jour, que si l’huître ou l’escargot utilisait ses forces de cristallisation - qui lui permettent de construire simplement sa coquille - pour penser, elle ou il serait le plus grand génie de l’univers: il nous faut apprendre à considérer les animaux dits “ inférieurs ” de cette manière, ndt]. En hiver le Je humain élabore donc la sagesse, par laquelle Uriel combla son corps astral pendant l’été. La sagesse de l’été s’illumine l’hiver sous l’emprise des forces du penser.
Michel agit depuis l’autre hémisphère au printemps, tandis que Raphaël étend son influence sur les éléments naturels, et permet le développement des forces éthériques. L’action cosmique de Michel en automne concerne le libre développement du Je humain dans un agir conscient. Pour caractériser son action au printemps, Rudolf Steiner a recours au concept de mouvement, de “ mise en branle ”, comme manifestant la volonté : “ ce qui est à l’origine d’un ébranlement, d’un acte de préhension, d’implication dans le travail ”. Ainsi se s’agit-il pas de s’ébranler, ni de saisir, ni d’œuvrer, mais plus précisément, de forces qui mènent à ce début d’agir. À ce moment-là, l’impulsion pour une action à partir du Je a déjà été donnée par ses soins en automne. Lorsque Michel agit au travers du globe [au printemps, ndt], ses forces sont plus faibles, mais comme pour les autres Archanges, leur domaine d’action est plus élevé.

En été, Gabriel délivre la force de nourriture au corps éthérique ; Raphaël comble le corps astral de forces de guérison en automne ; Uriel donne des énergies de penser au Je en hiver; Michel agit sur les énergies d’impulsion, de mouvement, au printemps, condition nécessaire à un agir libre. Mais qui agit librement, n’agit pas seulement à partir du Je [purifié par catharsis des forces de l’ego, ndt], mais aussi à partir d’une vue d’ensemble que permet le Soi-Spirituel.
Si la considération du Soi Spirituel est encore profondément dissimulée à la conscience actuelle de l’être humain, Michel, lui, la perçoit très clairement. Tant que l’homme n’a pas édifié son soi spirituel, celui-ci est représenté par l’Ange, qui reçoit les impulsions de Michel au moment de Pâques pour les diriger vers le Je humain, à condition que celui-ci intègre ces impulsions michaéliques comme motifs de ses actions libres.
Chaque Archange, régent de saison, agit ainsi de concert avec l’Archange correspondant qui lui agit au travers du globe terrestre. Ils se “ tendent les seaux d’or ” successivement, l’un à l’autre dans le déroulement des saisons. L’été, Gabriel tend les forces de la nourriture à Raphaël qui atteint en automne son influence minimale. Raphaël transforme les forces de la nourriture en forces de guérison [que l’aliment soit ton médicament! ndt], qu’il tend à Uriel dont l’activité décline au même moment; puis Uriel façonne en hiver les forces de guérison en forces du penser. “ Le niveau inférieur de l’esprit ”, déclare Rudolf Steiner à ce propos, “ est une force qui guérit ”. C’est pour cela que le penser est si sain. Le penser épure, clarifie l’âme, car il procède d’une force thérapeutique. Uriel, quant à lui tend les forces du penser hivernales à Michel, dont l’influence décroît en hiver, qui les transforme à son tour en forces de mouvement et d’impulsion.
Cette impulsion qu’éveille la force du penser métamorphosée par Michel peut se développer dans deux directions: d’un côté, elle est une impulsion d’actes libres dans le domaine physique, au niveau duquel d’ailleurs se referme le cycle saisonnier; de l’autre, cette impulsion trouve une voie vers la connaissance, vers l’imagination, qui procède du Soi-Spirituel.

En tant qu’Archange le plus important pour le développement de l’humanité, Michel ne clôt pas seulement le cycle naturel annuel des saisons, il l’ouvre aussi vers un développement supérieur de l’homme. En effet, dans l’étape d’évolution qui va du Je au Soi Spirituel, le cycle saisonnier naturel se rompt, car cette étape présuppose avant tout un acte libre de l’homme. Il faut rappeler que le Je a été donné à l’homme. Certes, il devient actif par lui-même dans le cours de l’histoire, mais à l’origine, ce fut un don des Esprits de la forme (Exusiaï) à l’homme. Le Soi Spirituel, par contre, l’homme doit l’acquérir par lui-même dès le début. Michel ne peut l’aider de manière directe, mais il peut bien plus lui en montrer l’imminence. Son geste “ montre ”.
Les forces de métamorphose de la nourriture, de la guérison, de la pensée et du mouvement se dispensent chaque année à nouveau, au moment où Michel tend “ son seau d’or ” de ses forces d’impulsion volontaire croissantes à Gabriel, dont les forces sont décroissantes. Lorsque les forces du vouloir s’emparent de la vie physique, Gabriel les métamorphose en forces de nourriture: et le cours naturel se poursuit. 


Mais l’homme peut utiliser les forces d’impulsions volontaires mises à sa disposition par Michel pour entamer un développement supérieur des forces de connaissance, soulageant ainsi l’activité des Archanges. Par ce fait, l’homme devient coparticipant au développement de la Terre et de l’humanité.
Das Goetheanum, n°52/53, 1990.
(Traduction Daniel Kmiecik)



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